Le territoire donne sens à la coopération

Retrouvez le compte rendu des échanges de l’événement « Quelles approches coopératives pour faire territoire durablement ? », rédigé par Philippe Chibani-Jacquot, journaliste spécialiste de l’économie sociale et solidaire.
Pour aller plus loin, un compte-rendu plus complet est disponible en suivant ce lien.

En quoi le territoire fait sens dans les processus de concertation ? Pour Bastien Engelbach, coordonnateur des programmes à la Fonda, « l’approche par les territoires permet de sortir des approches de silo (…) Plus qu’un périmètre géographique le territoire est la conjonction d’une histoire et de relations humaines. Il est tellement cohérent qu’il permet de penser la coopération. »

Paul Daulny, responsable du programme Changer les territoires par l’action collective du F3E, insiste sur l’impact systémique d’une perspective territoriale de l’action : « Le plus grand apport de la perspective territoriale est de mieux comprendre la complexité en amenant à prendre en compte tous les jeux d’acteurs et d’actrices. L’idée force est que cette posture d’ouverture va avoir un effet bénéfique sur la dynamique partenariale. Et permettre à terme de faire davantage territoire par effet boule de neige. »

Evalue-t-on alors différemment un projet « territorial » d’un projet sectoriel plus classique? « L’évaluation sectorielle est toute en verticalité, l’évaluation territoriale est en horizontalité. C’est d’ailleurs à leur conjugaison qu’appellent les Objectifs de développement durable de l’ONU. Les 16 premiers, articulés à l’objectif 17 [qui invite au partenariat pour la réalisation des ODD], rappelle Charles-Benoît Heidsieck, président fondateur du Rameau.

Il faut articuler trois évaluations de nature différente. L’évaluation d’impact, l’évaluation de la performance sociétale des organisations et l’évaluation partenariale qui est très intéressante car, au regard d’une transversalité d’enjeux, on peut se mettre en rapport à plusieurs pour passer d’une évaluation en face à face à une évaluation en côte-à-côte. » 

Enfin Anne-Françoise Taisne, déléguée générale du CFSI part, elle, du choix de la coopération pour dessiner l’apport du territoire: « En passant d’un principe de l’aide [Nldr, des Nords vers les Suds] à la coopération [entre les Nords et les Suds], on engage un changement de posture et le territoire devient la source d’échange de pratiques. Le territoire devient alors le déclencheur de l’ouverture au monde. »

L’appui fédérateur de l’ODD 17

L’adoption par les Nations Unies des Objectifs de développement durable et tout particulièrement de l’ODD 17 est salué par les intervenants pour sa capacité d’effet levier sur la logique partenariale et la coopération territoriale.

Anne-Françoise Taisne rappelle que « l’ODD 17 favorise le pluri acteurs. Il ouvre les perspectives [pour] voir la globalité des choses. »

Benjamin Engelbach précise : « Les ODD sont livrés sans mode d’emploi. Il est donc important de créer des outils pour se les approprier. L’ODD 17, est la clé de voûte, pourvu qu’on soit capable de s’outiller, car elle pose la nécessité de dialoguer pour penser les autres de manière globale. C’est pourquoi la Fonda travaille à la réalisation d’un guide méthodologique. »

Paul Daulny estime toutefois que « s’ils sont à saluer, les ODD ne sont pas forcément suffisants. Ce qui est intéressant avec les Approches orientées changement (AOC) initiées au sein du F3E, c’est qu’elles font fortement écho à l’ODD 17, en permettant de remettre de la vision de long terme, travailler sur une projection positive, sortir de la logique unique de cycle de projet et construire de la dynamique partenariale. »

Anne-Françoise Taisne confirme : « il faut du temps long pour la co-construction. Les ODD sont des éléments importants en termes de posture de coopération qui a beaucoup avancé. »

Charles-Benoît Heidsieck insiste sur un autre point : « la coopération ne se décrète pas. Il faut se donner des outils, du temps et de la méthode. Mais le degré de maturité des acteur-ice-s est variable [entre eux et entre territoires]. Ce qui compte c’est comment on se dote de moyens et d’un chemin partagé pour structurer la coopération. »

Partage de quelques outils pour aller plus loin

Les outils du F3E :

Les « approches orientées changement » sont un ensemble d’outils et de méthodes pour planifier, suivre et évaluer des actions dont le but est d’accompagner des processus de changement. Au-delà de la méthodologie, elles invitent les acteurs impliqués à s’interroger sur leur vision d’un futur commun et sur leurs positions respectives. Le F3E s’appuie notamment sur la fleur du changement afin de penser les niveaux de changement (acteur-ice-s, collectif, territoire) et leurs interactions. Elle s’utilise comme un outil de pilotage, de suivi des changements mais également d’évaluation des changements atteints ou non, prévus ou non.

Ex. Equipop sur un projet au Bénin. Le projet visait à renforcer la capacité d’agir des jeunes notamment dans le cadre de l’accès à la santé.

Cette fleur a permis de visualiser la mobilisation des jeunes et de leurs alliés, en lien avec les élu-e-s du territoire.

Les outils de La Fonda:

« Faire ensemble 2030 », le serious game pour coopérer au service des ODD : une distribution des rôles, trois défis transversaux (social, économique, environnemental) à relever et une heure pour construire un optimum de coopération.

Le Carrefour des innovations sociales : une base de données numérique et mutualisées par huit organisations réunissant une documentation sur les initiatives de coopération.

Les outils du Rameau

  • L’observatoire des partenariats, animé par le Rameau offre des données qualifiées sur des centaines de partenariats
  • Programme co-construction territoriale : donne accès à des méthodologies d’ingénierie et des bonnes pratiques L’innovation territoriale en action.
  • Les catalyseurs territoriaux : ce sont des acteurs et actrices des territoires dont l’objectif est de faire le lien entre ceux qui ne se connaissent pas. Ils peuvent accompagner, gérer des lieux ou tiers-lieux, piloter des projets ou organisations.

Les outils du CFSI  :

Coopérer autrement en acteurs de changement (CAAC) : il s’adresse aux membres du CFSI et vise à examiner et anticiper les pratiques de coopération de demain, reliant les acteurs de deux territoires, ici comme ailleurs, autour d’enjeux partagés. Chaque projet est co-construit par les participants pour progresser et faire ensemble.