Questionner sa vision du changement : de l’autonomie à l’émancipation des femmes

BATIK International témoigne des effets imprévus de ses projets visant l’émancipation des femmes en Afrique du Nord et de la manière dont l’intégration de la perspective de genre intersectionnelle a fait évoluer ses actions.

A travers son article Questionner sa vision du changement : de l’autonomie à l’émancipation des femmes, BATIK international revient sur son expérience au sein de programmes encourageant l’entrepreneuriat féminin en Algérie, en Égypte, au Maroc et en Tunisie.

Les limites rencontrées

L’évaluation de l’un des programmes de BATIK international a mis en évidence l’impact négatif que l’autonomisation financière des femmes a eu sur leur charge mentale, leur charge de travail et sur les relations de pouvoir existant au sein du foyer, voire a servi de prétexte à la violence conjugale.

Ce décalage entre la volonté d’émancipation et les résultats obtenus a fait émerger la nécessité de repenser les actions depuis la perspective de genre pour véritablement accompagner les femmes vers l’émancipation. 

Une démarche de réflexivité et d’ajustement pour favoriser le renforcement du pouvoir d’agir des femmes

Il est apparu essentiel de réfléchir collectivement aux différents rapports de domination auxquels sont confrontées les femmes et de questionner la notion d’émancipation.

Ce processus a été un moment fort d’apprentissage pour BATIK International et ses partenaires qui ont intégré de nouveaux concepts. Ce qui a notamment contribué à structurer leurs approche et positionnement.

Ces moments d’échange BATIK International et ses partenaires sont devenus de véritables espaces de renforcement du pouvoir d’agir pour les participant-e-s. Elles et ils se sont senti-e-s renforcé-e-s sur leurs connaissances et leur estime d’elles-mêmes et d’eux-mêmes et ont vu leur travail valorisé.

Cette expérience a conduit à une prise de conscience sur ce qu’est le renforcement du pouvoir d’agir. Il implique en effet un changement de posture de la part des agent-e-s de développement pour que les personnes concernées par l’action puissent faire leurs propres choix, en se gardant de « faire à leur place ».

Les leçons tirées

L’intégration de l’approche genre intersectionnelle dans la stratégie d’intervention a renforcé le pouvoir d’agir des femmes : elles ont pris conscience de leurs droits et de leurs capacités. Elle se sont senties valorisées et reconnues par leur entourage. Ce changement de regard a contribué à reconstruire le rôle des femmes au sein de leur famille et de leur communauté, et donc à créer de nouveaux imaginaires sur les identités de genre.

L’expérience démontre l’importance d’une approche holistique (empouvoirement social et économique) et adaptée au contexte, pour éviter de placer les femmes dans des situations de vulnérabilité, en l’occurrence de violences intrafamiliales.

Un enjeu majeur reste à traiter : celui de la participation des femmes à la prise de décisions au-delà de la sphère familiale, dans la communauté ou au-delà.

Cet article a été réalisé dans le cadre d’Inclure pour transformer un ouvrage collectif coordonné par le F3E en 2021. Il réunit des praticien-e-s d’organisations de solidarité, du monde de la recherche ainsi que de consultant-e-s (France et international).